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Chroniques d'un reporter au coeur du Tour de France
2 juillet 2017

33 ans plus tard

 

C'est une histoire si vieille. Aussi vieille que l'affaire du petit Grégory. Elle s'est d'ailleurs déroulée trois mois plus tôt, en juillet 1984.

C'est le Tour 1984. Le grand favori s'appelle Laurent Fignon, vainqueur de l'édition précédente. Cette année-là, un coéquipier de Fignon, Vincent Barteau, s'empare du maillot au bénéfice d'une échappée qui lui offre 17 minutes d'avance à l'arrivée et va lui permettre de s'habiller en jaune pendant quatorze jours. Barteau, c'est la tronche du Titi parisien, même s'il est normand. La bonne tête blonde à qui on a spontanément envie d'offrir un verre au comptoir.

C'est là que j'arrive dans l'histoire. Maison de campagne en Savoie de mes grands-parents. Les vacances 84. Le journal L'Equipe que je vais chercher à vélo et qui paraît en jaune le lundi, en rose le samedi et avec des photos en noir et blanc. Et moi, je suis plutôt l'adolescent un peu gris, qui ne rêve que des Verts de Saint-Etienne et des maillots jaune de Bernard Hinault.

Avec mes grands-parents, le soir juste après le dîner (on mangeait tôt), on regardait «le Journal du Tour» sur Antenne 2. Mon grand-père s'était passionné pour Barteau et avait décrété qu'il pouvait gagner le Tour. J'avais répondu, avec mes certitudes, que c'est Fignon qui gagnerait et qu'il n'y comprenait rien. Effectivement, Fignon avait fini par dépasser ce pauvre Barteau et remporté son second Tour. Et j'avais eu raison de mon grand-père pour l'éternité.

Mais....

Hier soir, une partie de la presse française était invitée par Skoda pour le traditionnel repas d'avant-Tour. A table, je me retrouve à coté de Vincent Barteau. Bon, au au niveau de l'enrobage du bonhomme désormais bien rond, il est évident que je n'ai pas été le seul, pendant 33 ans, à vouloir lui payer un coup au comptoir. Et beaucoup ont dû sortir leur porte-monnaie...

Pendant deux heures, la gouaille en bandoulière et la sympathie franche sur le porte-bagages, Barteau va me raconter son Tour 84. Pour résumer, il aurait pu le gagner si Cyrille Guimard, son directeur sportif qui préferait Fignon son leader, ne lui avait pas mis quelques bâtons dans les roues.Comme, par, exemple, lui planquer son vélo de contre-la-montre, le matin d'un chrono. «Ce con de Guimard», répètera-t-il plusieurs fois. Pour info, lors du dîner, le con en question était à trois mètres, pris dans une autre conversation.

A la fin, on s'est levé. Barteau m'a tapé sur le bras et lancé «où qu'il soit maintenant, tu pourras lui dire à ton grand-père : il y comprenait quelque chose. J'aurai pu le gagner ce putain de Tour».

Papy, où que tu sois, je voulais te le dire : C'est si bon d'avoir tort 33 ans après.

bardeau

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Commentaires
B
J'adore l'histoire, ton grand père les souvenirs et lire que tu as peut être eu tort....dur d'être seulement spectateur et de ne pas être invité dans les coulisses !!!
M
Merci pour ton grand père
Chroniques d'un reporter au coeur du Tour de France
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